Sous ses dehors d’enfant sage, Nicolas Idier habite depuis toujours la soixante-cinquième case de l’échiquier. Né l’année de l’élection de François Mitterrand et de la mort de Jacques Lacan, il passe une enfance profondément heureuse entre Neuilly-sur-Seine, Montpellier, l’île d’Oléron et la Costa Brava. Le choc de sa première jeunesse se produit en 1998, lorsque, grâce à son professeur de latin, il est envoyé à Eltham College, en Australie. A 16.781 km du domicile familial, impasse de la Pierre Rouge, l’adolescent adepte de skate-board et de thé découvre la joie exubérante de se réinventer, la fascination du lointain, le bonheur des langues. Il fait alors ses premières incursions dans la langue chinoise, qui deviendra le moteur de sa vie académique et de sa carrière.

A son retour en France, encouragé par l’admiration qu’il porte à Jack Kerouac, Charles Bukowski et Henry Miller (la sainte trinité américaine), il se lance dans un autre voyage: celui de l’écriture. Son premier manuscrit s’intitule La Soixante-cinquième case, titre prémonitoire et livre rapidement oublié dans un tiroir. Il part alors à Tanger, sur les traces de Paul Bowles, William Burroughs et de son père le journaliste Jacques Idier, et revient avec son premier roman: La ville noire, qui sera publié en 2011 aux éditions de Corlevour.

La ville noire rassemble les éléments structurels de son identité d’écrivain: le décentrement, le voyage intérieur, l’étrangeté, le goût du risque, mais aussi, la capacité du langage à surmonter tous les obstacles.

Nicolas Idier creuse le sillon du langage par son entrée au comité de lecture de la revue Nunc, dirigée par le poète Réginald Gaillard, ainsi que par un long stage aux Cahiers Rouges, collection dirigée par Charles Dantzig aux éditions Grasset.

En parallèle de cette formation sauvage au métier d’écrivain, il termine ses études avec une agrégation d’histoire et un doctorat de sinologie, entrecoupées d’incessants séjours en Chine. En 2010, il publie Shanghai, dans la collection Bouquins et l’année suivante, il soutient une thèse consacrée à Simon Leys, qu’il considère comme l’un des plus grands auteurs du siècle des totalitarismes.

C’est aussi à Shanghai qu’il noue ses grandes amitiés avec la romancière Pia Petersen, l’éditeur Jean-Luc Barré, l’oulipien Alexandre Labruffe et le ninja Ludovic Chaker, mais également avec de nombreux écrivains et poètes chinois, dont Shu Cai, Sheng Keyi ou Chun Sue.

De 2010 à 2014, Nicolas Idier vit à Pékin, où il exerce la fonction d’attaché culturel chargé du livre et du débat d’idées à l’Ambassade de France, puis se rend avec son épouse Irina, aux origines russes et espagnoles, en Inde, où le couple réside de 2014 à 2018. Ces huit années asiatiques le transforment définitivement et ancrent l’écriture au cœur de son existence. Ce sont les années des quatre livres: le diptyque chinois constitué de La Musique des pierres, publié par Philippe Sollers dans sa collection L’Infini aux éditions Gallimard, et Nouvelle jeunesse, publié par Aurélien Masson, le grand patron de la Série Noire, toujours aux éditions Gallimard; le diptyque indien constitué d’Une boite de nuit à Calcutta, avec l’immense romancier et poète Makenzy Orcel, publié aux éditions Robert Laffont, puis Dans la tanière du tigre, aux éditions Stock.

De retour en France, il s’installe en Charente, dans un ancien relai de chasse de François de La Rochefoucauld, dont il fait sienne la maxime 182: les vices entrent dans la composition des vertus, comme les poisons entrent dans la composition des remèdes. Même s’il accomplit avec le plus grand sérieux son devoir de serviteur de l’État, en bon confucéen et jusqu’au cabinet du Premier ministre et dans les plus grands ministères, Nicolas Idier reste taoïste dans l’âme, c’est-à-dire, parfaitement anarchiste. Ce n’est certes pas un hasard s’il a co-traduit le Dao De Jing aux éditions Conférence.

Son nouveau roman, Matignon la nuit, aux éditions Plon, plante son décor au cœur du pouvoir, où il fait entrer dans la plus grande clandestinité (vertu apprise auprès de Philippe Sollers) samouraïs, marabouts et devins.
Les écrivains sont des devins. S’ils ne voient rien, pourquoi écrire?

BIOGRAPHIE